Une usine logicielle SaaS
État des lieux des pratiques du SaaS
1. Introduction
Le grand changement industriel de ces dernières décennies, qui s’applique aussi à l’industrie informatique, vient du fait qu’elle doit dorénavant avoir l’agilité nécessaire pour pouvoir ajuster en continu son outil de production à l’évolution du marché et des produits qu’elle doit délivrer.
Auparavant, les acteurs industriels implantaient d’abord leur outil de production (l’usine) et c’était au produit de s’adapter à celui-ci. Aujourd’hui, le raisonnement est inversé : on cherche à adapter en permanence la chaîne de production aux nouveaux produits tirés par les nouveaux usages. C’est ainsi qu’un acteur comme Samsung a été l’un des premiers grands industriels à concevoir, industrialiser et commercialiser en des temps records une dizaine de nouveaux smartphones par an, de toute gamme, au début des années 2010, alors que ses concurrents avaient un rythme nettement plus faible. Samsung a ainsi fait quasiment disparaître des marques comme Nokia ou Motorola qui étaient sur le même segment de marché.
Dans l’industrie informatique, cette tendance s’est définitivement et durablement installée depuis le passage au SaaS et s’applique même dorénavant aux progiciels métiers qui restaient encore jusqu’à récemment le dernier bastion des cycles release traditionnels (une mise à jour majeure par an).
Pour s’aligner sur cette tendance, notre parti pris dans ce livre va être de décliner une stratégie R&D consistant à complètement aligner le pilotage de son usine logicielle à la gestion du service délivré, dans un contexte B2B (Business To Business) bien que certains concepts restent applicables au B2C (Business To Customer). Utiliser les mêmes patterns et les mêmes technologies pour son usine et pour son produit permet de créer une boucle d’apprentissage fertile et se résume à la formulation : "L’usine logicielle est un produit".
Avant de rentrer plus dans le détail de ce que nous appelons l’usine logicielle, nous proposons de prendre...
Modèle économique d’un acteur SaaS
1. Introduction
Pour faire les bons choix en termes de techniques et d’organisation dans une usine logicielle SaaS, il est nécessaire d’avoir en permanence un contrôle sur la chaîne de valeur et sur les dépenses associées. Cette maîtrise est plus cruciale que dans le monde On Premise, où la comparaison ne se fait que sur la partie marge sur le produit (le prix de la licence et le périmètre fonctionnel) et sur la partie intégration sous forme de marge projet.
2. Vocabulaire spécifique du SaaS
En mode On Premise, la tendance observée est d’avoir une marge sur chacune des composantes de prix (licence et maintenance) et on parle plutôt de "chiffre d’affaires", tandis que le modèle SaaS est basé sur de nouveaux indicateurs tels que ceux-ci :
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MRR (Monthly Recurring Revenu ou revenu mensuel récurrent) ou le même indicateur sur une année appelé ARR (Annual Reccuring Revenu).
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LTV (Life Time Value ou durée de vie client) permet de connaître, en le multipliant par l’ARR ou le MRR, le chiffre d’affaires qui va être réalisé avec ce client sur plusieurs années. Plus la durée de vie client est importante, plus le modèle SaaS est avantageux par rapport à un modèle de vente licence + maintenance.
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CAC (Customer Acquisition Cost ou coût d’acquisition client) est le prix dépensé pour acquérir un nouveau client (coûts de prospection marketing et commerciaux).
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Churn (taux d’attrition) qui se calcule de la manière suivante : Nombre de clients perdus sur une année / Nombre total de clients. C’est l’un des indicateurs les plus importants car il s’agit que le nombre de nouveaux clients compense, ou mieux, dépasse la perte au même moment de clients actuels. Habituellement, on cherche à ce que cet indicateur soit inférieur à 10 %, ce qui signifie que l’on vise une durée de vie de rétention d’au moins dix ans en moyenne.
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NPS (Net Promoter Score ou score net de promotion) est un indicateur de fidélité client et mesure si vos clients seront des promoteurs de votre solution.
Un NPS donne une valeur sans unité de -100 (tous...
Les produits délivrés par un acteur SaaS
1. Introduction
Nous avons vu que le modèle SaaS repose sur la capacité à souscrire facilement et à moindre coût pour de nouveaux clients.
Pour atteindre cet objectif, même si chacun a sa spécificité selon les domaines, tous les acteurs SaaS implémentent trois types de service :
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Le produit visible par client, que nous avons indiqué par convention comme étant le produit Bleu (ici Purchasey.io).
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Un ensemble de services permettant de simplifier la création d’un nouveau tenant pour un client, sans besoins d’interventions manuelles. Il peut s’agir de pré-package selon les typologies de clients (ex. industrie, pharma, grande distribution…) ou d’un package dit "vanille" permettant de démarrer avec une première configuration. Par convention, ce produit est dit "Jaune" et appelé ici Control Center. Ce produit est d’une certaine façon la partie "Administration" du produit mais avec un découplage dans un produit à part, lui permettant d’avoir accès aux différents tenants, ce qui change en pratique toute l’approche de configuration (voir chapitre Patterns d’Architecture logicielle pour le SaaS - section Gestion de tenants et du paramétrage).
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Un ensemble de services internes à l’éditeur, que l’on nommera par convention le produit Gris ou Administration Platform, permettant d’opérer la plateforme SaaS (et notamment son infrastructure). Il permet en outre la création d’instances d’applications de produits "Jaune" et "Bleu".
En ce qui concerne le cycle de vie de ces différents produits, le premier produit à installer est le produit Gris, qui va permettre d’initialiser en quelques clics ou en Self-Service sur le site web de l’éditeur, pour un nouveau client, une instance et une configuration par défaut d’un "Control Center" (produit Jaune). Une fois que ce Control Center est disponible, l’administrateur client (en général de la DSI) peut ensuite créer selon ses souhaits des tenants applicatifs, avec une configuration par défaut ; mais on peut aussi par exemple avoir une approche de type pipeline (comme...
Personnaliser (ou non) une offre SaaS
1. Le dilemme de la personnalisation
Un dilemme qui se présente toujours pour les équipes Produits et qui tend souvent les discussions opérationnelles sur la stratégie, en particulier chez les éditeurs de progiciels B2B, concerne la part de l’activité à consacrer (ou pas) à la fourniture de services spécifiques aux clients. Sur le papier, le modèle économique et architectural du SaaS se prête peu à l’exercice, que l’on peut même considérer comme un anti-pattern. Pourtant, des solutions pour rendre ouvert son système existent et sont même désormais un enjeu majeur de réussite et de fidélisation client.
Tout d’abord, quels sont les principaux moteurs qui tirent la demande de "customisation" client ? Voici une liste non exhaustive à partir de laquelle nous allons développer quelques réponses.
2. La personnalisation de l’interface graphique
La plus "historique" des demandes n’en reste pas moins toujours d’actualité. On doit distinguer ici deux types de demandes : la première est la customisation du "look" afin d’y apposer sa propre charte graphique, ce qui revient à rendre ouverte l’UI ; la deuxième est de personnaliser ses propres interfaces de bout en bout pour réaliser de nouvelles fonctions, ce qui revient à rendre ouvert un moteur UX.
La réponse à la première demande s’industrialise relativement facilement désormais en intégrant dès le début de son projet les technologies frontend qui faciliteront grandement le travail : CSS, Bootstrap, encapsulés dans une approche Theming permettent d’offrir au client des capacités de customisation puissantes et bien maîtrisées (sur les couleurs, les polices, les menus, logos, etc.), avec une application de la charte graphique à chaud. Il est souhaitable, pour que la R&D puisse dès la conception de ses IHM appliquer les bons design patterns, d’investir au commencement du projet sur un Design System et un Showcase, sorte de démonstrateur permettant d’industrialiser l’activité UI/UX au sein des équipes R&D.
La réponse...